Marseille, jardins menacés

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La construction d’un axe routier menace les jardins familiaux de Mazargues, à Marseille. Les opposants, nombreux, dénoncent un projet aberrant, véritable “aspirateur à voitures” qui va couper en deux une trame verte connectant plusieurs parcs et jardins. La dernière pétition a déjà rassemblé près de 8 000 signatures.

F. Ardito |

C’est un havre de paix et de fraîcheur au cœur des quartiers sud de Marseille, à Mazargues. 3,7 hectares de jardins familiaux, qui prospèrent depuis 120 ans. 106 parcelles dorlotées avec soin, bordées par un petit bout de forêt méditerranéenne sauvegardée qui contribue à rafraîchir le quartier lors des canicules qui se multiplient. Menacées par le Boulevard urbain sud (Bus), une 2×2 voies dirigée vers la mer, au niveau de Pointe Rouge. Le projet est un véritable serpent de mer, qui date de 80 ans et avait été enterré. Il a été relancé par la Métropole Aix-Marseille-Provence, alors que la ville de Marseille y est opposée. « Les jardins sont dans une zone classée cultivée, et donc ils étaient censés être protégés sur le PLUI (plan local d’urbanisme intercommunal). Mais en fait, les politiques considèrent ces zones cultivées comme des réservoirs de foncier ; ils ont juste déclassé l’emprise du boulevard sur 30 mètres de large et le tour était joué », s’insurge Badis Merad, jardinier et référent biodiversité à la Fédération nationale des jardins familiaux, propriétaire du terrain sur lequel sont installés les jardins Joseph-Aiguier. Le boulevard couperait ces derniers en deux, condamnant 2 ha sur 3,7 ha !


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Trame verte coupée en deux

L’axe routier va également traverser le parc de la Mathilde et la pinède du Roy d’Espagne, autres poumons verts des quartiers sud. Au total, ce sont 10 hectares de nature, formant une indispensable trame verte, qui seraient détruits, dans une ville réputée pour en manquer. Sans résoudre les problèmes de circulation, selon les opposants, car l’essentiel du trafic de pointe est dirigé vers le centre, à l’ouest. Or l’axe, lui, est orienté nord-sud. Au contraire, il pourrait aggraver les problèmes de circulation et la pollution de Marseille. « L’axe est dimensionné pour 35 à 40 000 véhicules/jour, mais il va s’arrêter à la mer ! L’impact de l’arrivée de toutes ces voitures sur le littoral, non loin du Parc national des Calanques déjà saturé, n’a pas été étudié », renchérit Florent Roubaud, autre jardinier de Mazargues et membre du collectif Canbus, qui réunit citoyens et associations luttant contre les nuisances du Boulevard urbain Sud. D’ailleurs, le dossier d’enquête publique montre que certains carrefours seront saturés dès sa mise en service. Autre inquiétude, l’urbanisation induite par le nouvel axe : « sur la ZAC Reynier, il y a 14 ha à bâtir, avec un fort potentiel urbanistique de standing, les promoteurs immobiliers ont tout intérêt à ce que ça se fasse… » fait remarquer Badis Merad. La première phase de la route, livrée en 2020, a déjà induit la construction de plusieurs milliers de logements.


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À la mi-juillet, la mairie de Marseille a perdu en appel son dernier recours, mais elle se pourvoit en cassation, tandis que Canbus a déposé un nouveau recours en mars 2025. La dernière pétition, signée par 6 500 personnes en 15 jours, atteint désormais les 8 000 signatures, et la mobilisation s’amplifie, soutenue par les grandes associations de protection de la nature – FNE, Greenpeace, Alternatiba, Respire… – et par Thomas Brail, l’un des “écureuils” qui grimpe dans les arbres pour s’opposer à l’A69. Il est temps, car la déclaration d’utilité publique deviendra caduque en septembre 2026 ; à cette échéance, la Métropole devra avoir terminé les expropriations et débuté les travaux. Pour les opposants, il faut donc empêcher à tout prix les travaux de démarrer dans les prochains mois. À votre tour, signez la pétition !  

https://agir.greenvoice.fr/p/boulevardurbainsud


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