Un minijardin d’aromatiques | 4 saisons n°253

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Trop souvent reléguées dans un coin du potager, les aromatiques méritent un autre destin. On peut les accrocher à sa fenêtre, jouer du carré médiéval ou opter pour des plantations express, en lasagnes. Trois façons de jardiner de façon ludique pour un bouquet de senteurs et une explosion de saveurs !
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S. Lapouge |

Qu’elles soient appelées aromates ou bonnes herbes, les plantes aromatiques accompagnent l’histoire de l’humanité comme assaisonnement et plantes de santé. On redécouvre aujourd’hui leurs saveurs, avec le plaisir de les cultiver. Faciles et généreuses, elles s’adaptent au milieu urbain et aux petites surfaces. Pour garantir leur succès, il faut veiller à choisir la bonne plante pour le bon endroit, comme pour tous les types de plantations. Commencer par s’intéresser aux conditions naturelles dans lesquelles elles poussent, c’est‑à-dire leur biotope : sol, ensoleillement et eau. Par exemple, le thym se plaît dans la garrigue, au soleil, en sol sec et drainé où il intensifie ses arômes. À l’opposé, la menthe, le persil et l’oseille préfèrent la mi‑ombre restant fraîche. On va donc, avant tout, réfléchir à des plantations et des associations par milieux, en regroupant les plantes de mêmes exigences. Ceci permet de résoudre la difficile équation de l’arrosage : les aromatiques de milieu méditerranéen se contentent de peu d’eau, alors que celles de mi‑ombre ont besoin d’être arrosées régulièrement. Fini lavande et romarin pourrissant par excès d’eau… ou le persil assoiffé, tout maigrichon.

Selon la place dont on dispose, trois options de culture s’offrent à nous :

  • en pots ou en bacs, pour jardiner au balcon ou sur une petite surface, et compléter la production du potager ;
  • en carrés, quand on a un petit lopin, pour mettre en valeur les aromatiques et les cultiver en jouant sur plusieurs thèmes ;
  • en lasagne, quand on a un sol inadapté ou pour une production ultra rapide et productive.

Entre mars (pour les vivaces) et mai (pour les annuelles), le printemps est le moment idéal pour faire ces plantations. Il ne reste plus qu’à choisir son option – ou ses options, car elles sont complémentaires.


Aromates en pots

Rien de plus pratique que d’avoir des aromatiques sous la main quand on est en train de cuisiner. Même pour ceux qui ont un potager, quelques potées sur le balcon, la terrasse ou accrochées au rebord de la fenêtre évitent de courir au bout du jardin à l’heure de la persillade.

La plantation peut se réaliser dans n’importe quel grand bac mais aussi dans des récipients de fortune, en perçant le fond et en ajoutant une soucoupe. Évitez les balconnières, trop petites, sauf pour l’ail et le persil. Le vaste choix des plantes peut s’adapter aux besoins, à l’exposition et au climat. Dans ce cas de figure, on se libère des contraintes du sol en préparant soi‑même le substrat qui remplit le pot.

Ce qui permet de varier les plaisirs !

PLANTATION

  • pour une exposition plein sud ou une courette brûlante : thym, hysope, serpolet, sarriette. Le terreau doit être additionné de 20 % de terre fine, et drainé avec un peu de sable. Dans des pots plus profonds, ajoutez fenouil, lavande, romarin. Cette composition de plantes méditerranéennes résiste également au froid et convient pour une maison de week‑end car elle nécessite peu d’arrosage ; plantez sans trop serrer et, au besoin, multipliez les pots en évitant les trop petits ;
  • à exposition ensoleillée non brûlante : des espèces nécessitant plus d’eau comme les agastaches, la verveine, la monarde fistulosa. Dans ce cas, l’apport de sable est inutile. Optez pour de grands bacs. Dès le mois de mai, ajoutez en grands pots individuels quelques espèces gélives comme la périlla de Nankin et les basilics, pour diversifier les saveurs ;
  • à l’ombre : ciboulette, persil, céleri vivace et oseille, qui seront à l’abri de la canicule. Utilisez un terreau de plantation complété de 20 % de terre fine. Régulièrement arrosés, ces aromatiques produiront plusieurs mois. Ajoutez les menthes en bac individuel, car ce sont de sérieuses envahisseuses.

Placez un drain au fond du contenant puis remplissez de substrat. Trempez les godets dans une bassine d’eau pour chasser les bulles d’air. Mettez‑les en place et, petite astuce, s’il reste de l’espace dans les jardinières, comblez les trous avec du persil qui poussera à l’abri. Plantez, tassez doucement, arrosez et paillez à l’aide de paillette de chanvre ou de petits galets pour les plantes méditerranéennes.

ENTRETIEN

Récoltez vos aromates régulièrement afin de stimuler la repousse. Les vivaces passeront l’hiver au balcon et repousseront dès le printemps. Il faudra remplacer les gélives, dont le persil. Un apport de lombricompost en février, puis un second dans l’été, maintiennent un sol fertile et prolongent les plantations.

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Avant d’être plantés dans un substrat mêlant terreau, terre fine et éventuellement un peu de sable, les plants doivent être mis à tremper : attendez qu’il n’y ait plus aucune bulle d’air qui remonte à la surface.
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Aromatiques en carrés

L’esprit des jardins médiévaux convient très bien aux aromatiques. Soulignés de bois ou de plessis, implantés dans le jardin ou incrustés dans une cour, des carrés de 1 m à 1,30 m permettent la plantation d’une gamme diversifiée, utile pour la cuisine et pour stimuler notre santé. L’atout des carrés est aussi de transformer le moindre espace en lieu d’agrément.

Ils s’implantent directement dans le sol si vous avez une terre arable, facile à jardiner. Dans ce cas, commencez par tracer l’emplacement au sol, grelinez puis désherbez soigneusement avant de poser des bordures en bois, en pierre ou en métal. Si votre sol est trop lourd, argileux, vous pouvez en rehausser le niveau avec une terre plus légère, en incorporant des cailloux pour la drainer ; s’il est trop pauvre pour accueillir des plantes gourmandes, amendez‑le à l’aide de compost très mûr.

Améliorer la nature du sol permet d’introduire une gamme de plantes plus variée : on peut par exemple créer un carré pour des plantes de milieux plus secs ou plus humides, en variant les substrats. Une fois la plantation faite, l’entretien des carrés se révèle extrêmement plaisant s’il est réalisé régulièrement ; c’est même la phase de décompression idéale après une journée de travail !

PLANTATION

On peut jouer sur différents thèmes, selon l’emplacement des carrés. Par exemple, on peut décider d’installer près de la cuisine les plantes aromatiques indispensables, qu’elles soient culinaires ou utilisées pour les tisanes et les boissons :

  • à exposition ensoleillée, on opte pour les méditerranéennes – calament (thé d’Aubrac), lavande, hélichryse, romarin, sarriette, thym, hysope, origan, serpolet et toute la gamme des sauges. Plantées dans des espaces surexposés, brûlants, elles présentent l’avantage de diminuer l’effet de réverbération et de surchauffe par la simple présence de leur feuillage ;
  • au soleil, en terre humifère, restant un peu fraîche l’été, on pense aux espèces moins courantes comme la monarde, les agastaches, mais aussi la verveine ;
  • à mi‑ombre, c’est le meilleur endroit pour cultiver les basilics qui souffrent du réchauffement climatique et ne supportent plus la canicule estivale. On y installe aussi le persil, la ciboulette, l’oseille, la mélisse ;
  • au nord, on s’offrira celles de la mi‑ombre, complétées par la luxuriance des bouquets de menthe et d’estragon.

On peut aussi choisir d’organiser des carrés selon les parfums. Sous les fenêtres, on favorisera les associations odorantes : hysope, lavandes, romarin, hélichryse et agastaches diffuseront leurs parfums jusque dans la maison. Près de la porte d’entrée ou le long des allées, les aromatiques comme le fenouil, l’hélichryse ou les menthes se laissent froisser ou caresser, pour une promenade olfactive.

ENTRETIEN

Ces carrés s’entretiennent sans difficulté et les espèces vivaces perdurent de nombreuses années. Procédez aux cueillettes régulièrement pour stimuler la repousse et n’hésitez pas à retailler les espèces à la croissance rapide (fenouil, basilic, agastache cana, sauge) et les fleurs fanées. En fin d’hiver, coupez les parties desséchées, arrachez les annuelles. Faites un léger binage, un surfaçage de compost suivi d’un paillage.

Les annuelles, comme le basilic et la périlla, sont remplacées en mai par de nouveaux plants. Le persil et le cerfeuil peuvent être ressemés, mais on peut aussi acheter de nouveaux pieds. Une astuce : les laisser grainer et se ressemer spontanément sur place en secouant les ombelles ici et là, dès qu’elles sont mûres.

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Les carrés d’aromatiques vont recevoir en majorité des plantes vivaces. Lors de la mise en place, veillez à maintenir un espace suffisant entre deux plantes, afin qu’elles puissent perdurer sans envahir leurs voisines et prendre leurs aises au fil des ans. Dans les intervalles, il est possible de repiquer de l’ail ou du persil.
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En pratique

  • Nivelez le sol à la griffe et mettez en place vos plants sans les dépoter, juste pour vérifier le résultat. Espacez‑les de 30 cm ou plus selon le développement de la plante adulte, notamment pour les arbustives. Les plantes les plus hautes (fenouil, monarde, angélique, etc.) seront installées au centre ou à l’arrière, selon que le carré est dans un espace ouvert ou adossé à une haie, voire à un mur.
  • Faites tremper les godets pour humidifier les mottes.
  • Ouvrez un trou au transplantoir et mettez les aromatiques en place (photo 1) ; ajoutez une petite pelletée de terreau ou de compost mûr (photo 2) pour les plus exigeantes (sauge ananas, agastache, verveine, monarde…) .

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  • Arrosez en cuvette (photo 3) et paillez de broyat ou de paillette de chanvre (photo 4).

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  • Dans les emplacements libres, vous pouvez repiquer toute l’année des oignons ou des caïeux d’ail, qui complèteront les saveurs en fournissant de délicieuses pousses fraîches à ciseler sur les salades.
  • Tout l’été, faites un suivi d’arrosage : le sol doit rester suffisamment frais (mais pas détrempé) pour les espèces de mi‑ombre et ombre. Entretenez en taillant (photo 5).

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Lasagne d’aromatiques

Cette technique fonctionne très bien pour les aromatiques gourmandes, préférant un sol frais : les basilics et la monarde, mais aussi l’angélique – dont les tiges sucrées, les feuilles et les graines servent pour la pâtisserie –, qu’on laisse se ressemer et les agastaches, au parfum anis-menthe-réglisse et aux fleurs mauve ou rose, très mellifères. D’autres plantes se plaisent particulièrement dans une lasagne : la ciboulette, l’oseille, ou encore l’ache, ce céleri vivace que l’on cueille feuille à feuille selon les besoins, et qui se ressème ; ou encore le fenouil (dans sa version vivace), dont on consomme les petits bulbes printaniers, puis les feuilles, fleurs et graines ; et enfin le persil, qui trouve ici un milieu favorable à sa croissance et devient prolifique dès qu’on le laisse se ressemer seul.

Évitez les menthes qui envahiraient tout en deux mois et les plantes méditerranéennes, nécessitant un sol chaud et sec.

L’idéal est de marier annuelles et vivaces. Les premières sont récoltées la première année et se ressèmeront – ou seront ressemées – et les secondes débutent un développement qui se poursuivra les années suivantes. Une méthode adaptée à un jardinage de week‑end !

PLANTATION

Pour garantir la réussite, choisissez une situation au soleil ou à mi‑ombre. Montée et plantée directement fin avril‑mai, la lasagne offre des récoltes abondantes dès juin et des basilics géants fin juillet.

Une fois la lasagne montée, disposez les plants en les espaçant de 20 à 30 cm et de 50 cm pour les espèces à grand développement (fenouil, ache). La tradition indique de placer les grandes au centre, mais vous pouvez alterner pour ménager plus d’espaces ombreux. Plantez en ajoutant un peu de terre ou de compost mûr autour des racines. Arrosez chaque pied en cuvette, à l’arrosoir, puis paillez l’ensemble de la lasagne à l’aide de broyat ou d’herbe, en débordant largement.

ENTRETIEN

Il consiste à arroser une fois par semaine pour éviter tout dessèchement de l’intérieur de la lasagne. Tuteurez au besoin. Une récolte suivie permet le renouvellement des feuilles. En cours d’été, la butte va se tasser et le haut des mottes peut apparaître : ajoutez une couche de broyat ou de feuilles humides pour rehausser le niveau.

La deuxième année, les plantes vivaces sont définitivement ancrées en pleine terre et on peut les conserver ainsi. Il n’est pas utile d’ajouter du compost mais vous reprendrez les soins classiques (binage, désherbage et paillage). S’il reste encore de la place, vous pouvez aussi repiquer en mai des basilics, du persil et de la coriandre.

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La lasagne se monte en alternant des couches de matériaux verts (azotés) et bruns (carbonés). Après les avoir trempés dans une grande poubelle d’eau, on les empile par couches de 5 cm, jusqu’à atteindre 30 cm. Un milieu adapté aux aromatiques gourmandes.
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Brigitte Lapouge‑Déjean

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