Des arbres adaptés au climat de 2070…

Article publié le
C’est une étude passée un peu inaperçue, mais qui donne des informations intéressantes sur les arbres susceptibles d’être le mieux adaptés au climat de 2070. Publiée en 2021, elle concerne Lausanne, ce qui explique peut-être le peu d’écho qu’elle a eu en France. Pourtant, le climat de cette ville suisse est assez proche de celui des grandes métropoles de l’est de la France.

chusa8 | Pixabay

Quels arbres planter actuellement en ville ? C’est LA question que se posent actuellement les élus des villes et leurs services des espaces verts, soucieux de plantations adaptées au réchauffement climatique en cours. En témoigne l’affluence des professionnels lors de la journée “Palette végétale urbaine : les solutions végétales au service des citoyens”, qui s’est déroulée le 6 février à Paris, à l’instigation de Val’hor, l’interprofession de la filière du végétal.

À l’aide d’une modélisation de la niche climatique de 110 essences d’arbres, une équipe de scientifiques a évalué leur potentiel d’adéquation avec le climat de Lausanne à l’horizon 2070. Couplé à d’autres critères (potentiel pour la biodiversité, potentiel envahissant et sensibilité aux ravageurs), l’outil peut être une bonne aide à la décision pour le choix d’essences résilientes.

Les scientifiques rappellent, en préambule, les changements déjà constatés en Suisse, notamment l’augmentation des températures moyennes de l’ordre de 2°C, avec une accélération marquée depuis les années 1980. Une hausse qui correspond à celle que l’on constate en France et qui montre que l’évolution des températures est plus forte en Europe qu’au niveau mondial. Ils constatent également que « toutes les essences arborées urbaines ne subissent pas [l]es assauts climatiques avec la même résilience. Si certaines montrent des signes de faiblesse à la moindre vague de chaleur (par exemple le hêtre, le tilleul à petites feuilles et l’érable plane), d’autres semblent s’en accommoder sans trop de difficultés (par exemple l’orme champêtre, l’érable champêtre, le chêne rouvre). Une grande incertitude demeure sur la capacité des diverses essences habituellement plantées en ville à faire face au cataclysme climatique prévu pour la fin du siècle. »

Tablant sur un réchauffement de 2 à 3°C supplémentaires d’ici le milieu du XXIe siècle (correspondant à un scénario pessimiste d’augmentation sans restriction des émissions de gaz à effet de serre), les scientifiques identifient 17 essences originaires de “biomes” (régions bioclimatiques) présentant la plus grande similarité climatique avec Lausanne en 2070 : par exemple, les forêts caduques illyriennes (Balkans), les forêts du centre-est du Texas ou les forêts sempervirentes de feuillus du bassin du Sichuan en Chine.

Les essences qui s’adapteraient le mieux à ces nouvelles conditions, avec une bonne tolérance aux stress thermiques et hydriques, sont les suivantes : albizia, mûrier noir, liquidambar, bouleau noir, cyprès chauve, virgilier à bois jaune, févier d’Amérique, chicot du Canada, tulipier, magnolia grandiflora, micocoulier de Virginie, sophora du Japon, mûrier blanc, cerisier à fleurs, poirier d’ornement, érable trident et orme de Sibérie.

À noter que sur ces 17 essences, seules deux sont originaires d’Europe, l’albizia et le mûrier noir. Les neuf suivantes sont d’origine américaine et les six derniers d’origine asiatique. L’équipe a donc noté le potentiel envahissant de ces espèces (existant pour le févier d’Amérique et le chicot du Canada), ainsi que leur potentiel de biodiversité – a priori faible pour le liquidambar, le févier d’Amérique, le tulipier, le magnolia grandiflora, le sophora du Japon et l’orme de Sibérie et, au contraire, élevé pour le cerisier à fleurs et le poirier d’ornement.

Une liste à prendre avec des pincettes, car la prospective sur le climat n’est pas chose aisée et l’adaptation du végétal ne cesse de nous surprendre. D’autres études sont en cours sur les mêmes thématiques dans diverses villes de France. Mais celle-ci a le mérite de proposer une méthodologie et des pistes à approfondir !

Marie Arnould

 

“Arborisation urbaine lausannoise et changements climatiques”, de Jérôme Pellet et Vincent Sonnay, de n+p biologistes, Christophe Randin, du Centre Alpien de Phytogéographie, Pascal Sigg, du Centre interdisciplinaire de recherche sur la montagne, Université de Lausanne, et Michael Rosselet et Emmanuel Graz, du service des parcs et domaines de la Ville de Lausanne.

À lire aussi
Livres
39,00