Savon noir, bicarbonate… sans risque ?

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Faut-il ou non couper les feuilles des poireaux ? Tailler les tomates, mettre du compost au fond du trou de plantation ? Parce que sur certaines questions concernant le jardin, il n’y a pas une seule mais plusieurs réponses – et surtout de nombreuses nuances –, les rédacteurs des 4 saisons donnent ici leur vision.
Savon noir, bicarbonate… sans risque ? 2

“Nuancer son approche”, Brigitte Lapouge‑Déjean jardinière‑paysagiste en Dordogne

Je dirais sans risque… pour l’utilisateur. Mais ces produits ne doivent pas être maniés sans discernement, afin d’éviter de trop impacter le milieu, les insectes. Il faut nuancer son approche selon les parties du jardin : en ornement, à moins d’avoir une plante à laquelle on tient vraiment beaucoup, même si les ravageurs sont très présents, on les laisse vivre. Au potager ou au verger, si le problème est récurrent, la question de la non‑adaptabilité ou du choix de variétés peut aussi se poser, comme celle de nos pratiques : les plantes ne sont‑elles pas trop fertilisées ou trop arrosées ? Si l’on traite, ce n’est jamais toute la rangée et plutôt au petit pulvérisateur qu’à la sulfateuse. J’utilise le savon noir, 100 % biodégradable, pour étouffer les pucerons sur les concombres ou les salades (1 c. à soupe par litre, une seule fois), mais sur les fèves je n’interviens pas. Je l’ai fait aussi contre le puceron cendré sur de jeunes pousses de pommiers ; ce n’est plus nécessaire maintenant que les arbres ont grandi. Et je ne fais jamais de préventif avec du savon noir. Pour le bicarbonate, c’est 1 c. à café par litre sur les tomates, uniquement sur les pieds atteints par le mildiou, parce que je comprends qu’on n’ait pas envie de perdre une récolte…

“Pas d’efficacité prouvée”, Guylaine Goulfier jardinière et formatrice dans l’Yonne

Que se passe‑t-il pour que tout le monde utilise au jardin le contenu du placard de cuisine ? Savon noir et bicarbonate ne sont pas considérés comme des produits de contrôle des ravageurs et maladies. Pour être autorisés à la vente, ils doivent faire la preuve de leur efficacité et de leur innocuité, tant pour les utilisateurs que pour l’environnement (abeille, milieu aquatique, etc.). Le savon noir et le bicarbonate de soude n’ont jamais été évalués puisqu’ils ne sont pas autorisés à la commercialisation. S’ils avaient un quelconque effet dans le jardin, les “anciens” auraient utilisé ces produits peu chers ! Le savon noir est commercialisé… mais juste comme lustrant et, surtout, comme simple “mouillant”, un additif favorisant l’accroche des gouttelettes sur les feuilles. Il est biodégradable. Ce qui ne veut pas dire qu’il est sans toxicité. C’est un nettoyant, un détergent : il dissout la matière organique. Mal dosé, il peut donc endommager la surface des végétaux. Comme votre peau si vous ne vous rincez pas après vous être savonné. On ignore tout autant l’impact du bicarbonate de sodium qui n’a jamais été utilisé en protection des cultures, faute de démonstration d’efficacité. Il est souvent confondu avec le bicarbonate… de potassium qui, lui, est un fongicide dont l’usage est réservé aux agriculteurs.