Ma miniserre mobile, un vrai jouet !” | 4 saisons n°245

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Prouver qu’il est possible de faire ses semis dans un espace restreint et des conditions difficiles d’ensoleillement, c’est l’objectif que s’est fixé François Rouillay. Installé dans la Haute-Vienne, cet auteur et jardinier a conçu une petite serre mobile avec les moyens du bord, en utilisant des matériaux récupérés ici et là. Secrets de fabrication d’une serre aussi croquignolette qu’efficace !
Ma miniserre mobile, un vrai jouet

Lorsqu’il est refermé, le toit, à 45°, permet une bonne aération grâce à deux volets. Lors des nuits fraîches, ces derniers sont mis à plat l’un sur l’autre ; seul un filet d’air passe. À défaut de montants de fenêtre, François Rouillay conseille de réaliser les parois avec une deuxième palette : il suffit de découper à la scie circulaire des baguettes de quelques centimètres de large.
F. Rouillay |

Comment est née l’idée de cette serre mobile ?
Dans le contexte du confinement ! Nous étions mi-mars : tous mes semis étaient derrière une fenêtre et il n’y avait déjà plus de place pour ceux de cucurbitacées. J’ai profité de ce temps libre pour fabriquer cette petite serre. L’idée était de mettre les semis sur la terrasse, tout en les protégeant des gelées, mais également de pouvoir les déplacer facilement. En effet, notre terrasse est coincée entre deux bâtiments qui font de l’ombre : la serre est donc mobile, afin de suivre la course du soleil. Nous habitons à la campagne mais je l’ai aussi conçue dans une configuration de ville, par exemple pour des jardiniers urbains qui disposent d’une petite cour et souhaitent faire leurs semis. Elle est adaptée aux petits espaces et aux conditions réduites d’ensoleillement.

Quelles sont ses particularités ?
C’est un vrai jouet ! Grâce aux roulettes, on peut la déplacer d’est en ouest pour que les semis soient au soleil toute la journée. Elle comprend quatre parois, entièrement amovibles, et un toit à 45° avec deux volets. L’articulation des parois par des charnières permet une ouverture complète ou partielle des façades et du toit, pour pouvoir intervenir ou arroser aisément. Les parois sont fixées entre elles par de petites vis mais on peut les dévisser en un tour de main pour qu’elles reposent entièrement au sol. La capacité d’accueil est intéressante : une soixantaine de godets environ. Cette serre est très utile pour les plants de courgette, butternut et potimarron, assez volumineux.

« On peut la déplacer d’est en ouest pour que les semis soient au soleil toute la journée. » François Rouillay

Quels matériaux avez-vous utilisés pour la concevoir ?
Uniquement des matériaux de récup’ ! En premier lieu, des petits-bois [des montants en bois divisant le vitrage d’une fenêtre, ndlr] que j’avais démontés et gardés en sachant qu’ils serviraient un jour. Le confinement aidant, je me suis dit qu’ils seraient parfaits pour construire les parois de la serre. D’autant que leurs dimensions (80 x 55 cm et120 x 55 cm) correspondaient à une palette européenne (80 x 120 cm) que j’avais stockée et qui a servi pour le fond. Pour les “vitres”, je me suis servi du plastique d’emballage d’un matelas, que j’avais conservé : il est transparent et épais, idéal pour cela !

Détaillez-nous les étapes de réalisation…
J’ai commencé par visser quatre roulettes standard, de type caddie, sur la palette. Pour former les parois, j’ai assemblé quatre petits-bois sur la palette avec des charnières, puis assemblé verticalement les parois entre elles par des vis.
Pour le toit, j’ai fixé avec des charnières deux petits-bois sur les parois les plus longues, en veillant à ce qu’ils n’aient pas la même largeur, pour former un angle permettant l’aération : le premier volet mesure 36 cm de large, et le second 55 cm. Ensuite, il ne restait plus qu’à agrafer le plastique transparent sur les petits-bois, avec une agrafeuse murale. Au départ, j’avais mis quatre agrafes par fenêtre mais, très vite, j’en ai ajouté pour que la serre ait une bonne tenue au vent. Il m’a fallu trois heures au total pour la réaliser.

Comment l’avez-vous utilisée ?
Au printemps, elle a tourné à plein régime. Au début, j’ai placé les semis de pois chiches noirs, de tomates et de cucurbitacées. Jusqu’aux saints de glace, j’ouvrais les parois et le toit en journée, et je refermais la nuit ou lors des journées froides. Lorsque tout a été planté, elle a de nouveau servi pour des semis tardifs de courgettes. Je compte aussi l’utiliser pour un retour de production à l’arrière-saison, en installant les semis de légumes d’hiver : choux, salades, poireaux… car, ici, en Haute-Vienne, les nuits sont fraîches ! Au final, elle a passé toutes les épreuves – coups de vent, orages, pluies – et a tenu sans problème. Et les semis n’ont pas gelé !

Cette serre mobile était un premier essai. A-t-il été concluant ?
Oui, elle m’a donné satisfaction ! Les plants peuvent pousser jusqu’au toit – à environ 50 cm de hauteur ; on y accède de tous les côtés et elle est entièrement gratuite, grâce aux matériaux recyclés. Cet outil fait maison prouve que sans argent et dans un espace restreint, on peut tout à fait produire ses plants. Pour multiplier le volume de semis, on peut même en fabriquer plusieurs !

Si vous deviez la refaire, quelles améliorations apporteriez-vous ?
Je mettrais peut-être une deuxième palette sous la première pour pouvoir travailler assis et gagner en confort. Avec 30 cm de plus en hauteur, ce serait une Rolls ! 


La bio du jardinier

Initiateur du mouvement des Incroyables Comestibles France en 2012, François Rouillay a accompagné le développement de collectifs citoyens d’agriculture urbaine dans plus de 1 200 villes. Conférencier, formateur et chercheur, il oriente ses travaux vers l’autonomie alimentaire des villes. Il est ainsi co-auteur, avec sa compagne Sabine Becker, du guide En route pour l’autonomie alimentaire (éd. Terre vivante, 2020). Le couple a longtemps vécu dans une maison de ville à Aigues-Mortes (Gard), avec une unique terrasse en béton en guise d’espace cultivable : c’est là qu’ils ont imaginé la marelle comestible, le radeau nourricier, la tour végétale… pour montrer qu’il était possible de recréer du sol en ville. En 2019, ils ont déménagé à Meuzac (Haute-Vienne), dans une maison avec 5 ha de terrain, qu’ils utilisent comme lieu d’expérimentation. Outre un grand potager (environ 500 m2) et un jardin-forêt, ils continuent de pratiquer la permaculture appliquée à des conditions urbaines (keyhole garden, butte chinampa, lasagnes…) et d’agir pour le développement de l’autonomie alimentaire des villes, via des outils pédagogiques conçus pour les particuliers et les collectivités.

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Ingrid Van Houdenhove

F. Rouillay |