Lionel Astruc

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Auteur et journaliste, diplômé de Sciences Politiques, Lionel Astruc a publié une dizaine d'ouvrages consacrés aux thèmes de l'écologie et de l'économie solidaire. Ses articles et reportages paraissent également dans la presse (L'Express, La Vie, Libération...). Lionel Astruc a consacré de nombreuses enquêtes à remonter les filières de produits « durables » (alimentation, mode, tourisme...), à travers le monde, pour en montrer les enjeux, mais aussi révéler leurs limites.

Pouvez-vous nous parler de votre parcours ? Comment s’articule votre vie d’écrivain avec votre vie tout court ? Comment en êtes-vous venu à vous intéresser à l’écologie en général et aux thématiques que vous traitez en particulier ?

Mon diplôme de l’Institut de Sciences Politiques en poche, je deviens journaliste et me spécialise dans les domaines de l’écologie et de l’économie solidaire. Mes enquêtes ont été publiés entre autres dans l’Express, Libération ou La Vie, et j’ai été rédacteur en chef de numéros Hors série développement durable pour d’autres magazines.
J’ai également écrit plusieurs livres sur le thème de l’écologie, dont Manger Local, s’approvisionner et produire ensemble préfacé par Rob Hopkins (Actes sud, 2011), Aux sources de l’alimentation durable, nourrir la planète sans la détruire (Glénat, 2010), Voyages aux sources de la mode éthique (Ulmer, 2009) et Voyage en terre durable, un tour du monde des alternatives écologiques et équitables (Glénat 2007). J’ai enfin co-écrit Conseils et astuces pour vivre écologique (éditions Que Choisir, 2010), 1000 façons de consommer responsable (La Martinière, avril 2008), dirigé par Yann Arthus Bertrand et La vie en vert dirigé par Elisabeth Laville.
Ce qui motive ce parcours : l’envie d’évaluer et de montrer concrètement les atouts de l’écologie pratique.

 

Pour chacun des livres écrits à Terre vivante, quelle a été votre motivation pour le sujet ? Quelles ont été les expériences qui vous ont permis de nourrir les thèmes abordés ?

Echappées vertes est le premier livre que j’ai écrit pour les éditions Terre vivante. L’écriture de guides Lonely Planet et de nombreux reportages sur le thème de l’écotourisme pour la presse m’ont naturellement mené à ce projet.
Concernant le second ouvrage, Vandana Shiva, l’épopée d’une Indienne pour la biodiversité, le personnage de Vandana Shiva m’a attiré pour plusieurs raisons. Son engagement autant que son destin sont ceux d’un Gandhi moderne. Avec des moyens très modestes Vandana Shiva est parvenue à sensibiliser des centaines de milliers de paysans aux risques de la biopiraterie. Pour protéger et défendre ces fermiers souvent pauvres, cette activiste est parvenue à confondre et finalement à faire plier certaines des multinationales les plus puissantes du monde, avec tous les risques que comporte une telle démarche. Son combat montre que même les propagandes les plus massives ne peuvent rien contre la vérité.

 

Y-a-t’il un fil conducteur entre tous vos ouvrages ?

Oui. Nous vivons une période où les solutions existent pour venir à bout des crises écologique, sociale et économique, mais ne sont pas encore généralisées. Elles vont souvent à l’encontre d’une logique de profit à court terme et apportent davantage de capital social et écologique.
Beaucoup d’entre nous refusent donc tout simplement de voir ces issues possibles qui représentent une remise en question importante. Certaines de ces initiatives sont appliquées à l’échelle d’une organisation type “entreprise”, d’autres concernent des territoires entiers et représentent de véritables modèles. Elles sont parfois lointaines, en Asie ou en Amérique latine, mais aussi souvent sous nos yeux, en Europe.
L’objectif de la plupart de mes enquêtes et de mes livres est de faire connaître les solutions qui ont été éprouvées et sur lesquelles nous avons du recul, à la fois pour prendre une distance critique, mais aussi pour affirmer : « ça marche!». Je cherche aussi à faire connaître les personnes souvent exceptionnelles qui ont porté ces projets pionniers.

 

Si vous deviez décrire Vandana Shiva, l'”héroine” de votre dernier livre, en quelques mots ou adjectifs, lesquels seraient-ils ?

Tout d’abord, Vandana Shiva a une vie à dormir debout, et ce depuis son enfance. Ce livre montre d’ailleurs qu’une héroïne de cette envergure se construit quasiment sur plusieurs générations : Vandana Shiva a baigné dans une culture gandhienne à la fois très ouverte, mais aussi particulièrement engagée. Ses parents et ses grands parents étaient déjà des personnages hauts en couleur et prêts à donner leur vie pour une cause. Ajoutez à cela l’érudition et la culture scientifique de Vandana Shiva et vous avez en face de vous une femme capable de soulever, vallée après vallée, les populations de provinces entières contre les excès de l’agro-chimie et la biopiraterie.

 

Être édité par Terre vivante, cela a peut-être pour vous un sens particulier ? Pouvez-vous nous en parler ?

Oui, j’habite le Trièves et je suis sensible à l’histoire de cet éditeur et du centre écologique Terre vivante. Chacun peut imaginer la conviction qui était nécessaire, il y a trente ans, pour vanter les mérites de l’agriculture biologique. Je crois que les militants de l’époque passaient simplement pour des illuminés. Les fondateurs de Terre vivante étaient des pionniers et le choix du statut de Scop est pour moi l’une des garanties que cet état d’esprit se prolonge aujourd’hui à travers les livres et le centre Terre vivante.

 

Que ce soit dans les gestes quotidiens de votre vie professionnelle ou de votre vie personnelle, pouvez-vous nous donner quelques exemples de ce que vous faites en matière d’écologie ?

Comme beaucoup de nos concitoyens, ma famille et moi, nous essayons de privilégier un approvisionnement alimentaire aussi local et bio que possible. Ce n’est pas une contrainte mais simplement un plaisir. Nous essayons de mettre d’autres domaines de notre vie quotidienne en cohérence avec nos convictions. Notre maison est un exemple : elle a fait l’objet d’une rénovation écologique de la cave au faîtage et d’une isolation extérieure « expérimentale » pour les intervenants qui l’ont réalisé. Là encore, cela apporte une grande satisfaction. Mais n’oublions pas les points noirs : je continue pour mon travail de reporter et d’auteur à voyager dans les pays lointains. La cadence s’est réduite, mais cela reste excessif… Encore des efforts à faire !

Lionel Astruc