Légumineuses : azote ou pas azote ?

Article publié le
Dans la brève De l’azote grâce aux légumineuses ? (n° 242, p. 6), Denis Pépin précisait que les légumineuses n’apportaient finalement pas d’azote à leurs voisines. Je l’ai lu également dans Le potager du paresseux, de Didier Helmstetter (Tana éd.). Pour Stefan Sobkowiak (n° 244), il faut alterner fruitiers et fixateurs d’azote. Y a-t-il un réel intérêt, autre que la diversité, à planter des légumineuses ? Frédéric Lebastard, Noron-la-Poterie (14)
Potager sauvage

La réponse des 4 saisons

Question complexe ! Nous avons appris à découper la vie en tranches pour comprendre chaque phénomène. Gardons à l’esprit sa complexité, l’intrication et l’équilibre – mouvant et subtile – des éléments et des êtres vivants au sein de l’écosystème. (Re)lisez La révolution d’un seul brin de paille de Masanobu Fukuoka (éd. Trédaniel) ! Le mythe du « NPK », issu de l’industrie d’après-guerre, a la peau dure ! Cette extrême simplification des cycles de la matière, de la physiologie des plantes, de l’écologie des sols, brouille notre compréhension et induit des croyances erronées : l’azote est un élément parmi beaucoup d’autres, gare à ne pas nous focaliser trop !

De nombreuses bactéries du sol, libres ou symbiotiques (Rhizobium et légumineuses, actinobactéries et aulnes…), captent le diazote N2 de l’air et le transforment en molécules plus complexes : nitrates NO3-, nitrites NO2-, ammoniaques NH4+, protides… Implanter des légumineuses favorise les populations de Rhizobium, qui alimentent en azote leurs plantes hôtes. Les plantes voisines sont donc moins concurrencées sur cette ressource. De plus, la décomposition des bactéries mortes fournira des nutriments.
Pour que votre sol vive, soit fertile et équilibré, favorisez et acceptez la complexité, acceptez de ne pas (tout) comprendre : lâchez prise ! Nous perturberons moins le monde lorsque nous cesserons de vouloir tout contrôler.

Tout être vivant est constitué de protéines, donc d’azote. Par apports de matière organique (MO) « complexe » en surface (mulch, compostage de surface, engrais verts…), vous nourrirez la faune, le microbiote (bactéries, fonges…), permettrez leurs réactions métaboliques et leur multiplication. Leurs excrétions, leurs cadavres, les déchets et dépouillent de leurs prédateurs contiennent de l’azote sous forme complexe. La boucle est bouclée : les déchets des uns est la nourriture des autres.
Une étude de 2014 du spécialiste mondial des vers de terre Marcel Bouché, citée ici, tend à démontrer que les lombrics nourrissent les plantes en azote, par leur seule présence : favoriser les premiers par le non-travail du sol, par des apports de MO non-enfouies et par la diversité des espèces végétales suffirait à pourvoir aux besoins des secondes, dont le sol est à la fois système digestif et immunitaire ! De nombreuses autres espèces en tireront profit.

En faisant au plus simple, on répond parfois au mieux : copiez la nature, le reste se fera naturellement.